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HERVÉ GRIMAL : UN TRAIT D’UNION ENTRE LE VOYAGEUR ET L’ARTISTE
Par Emmanuelle Volage
Perse – Iran, un trait d’union entre l’Orient et l’Occident de l’artiste voyageur Hervé Grimal paraissait en avril 2021. Dans ce livre d’artiste artisanal et personnel, il retrace son exploration d’un pays doté d’une richesse culturelle et humaine extraordinaire. La rédaction l’a rencontré pour échanger autour de sa pratique, et particulièrement de ce dernier bel ouvrage.
Le Vietnam et Chypre en 2019, Suzhou et Shanghai en 2018, L’Auvergne en 2016, La Turquie en 2009, etc. La liste des livres d’artiste d’Hervé Grimal est aussi longue que celle de ses voyages, et révélatrice de l’itinéraire d’un passionné. En avril 2021, l’artiste voyageur publie dans un nouveau livre d’artiste artisanal et personnel, Perse-Iran, un trait d’union entre l’Orient et l’Occident, son expérience de trois semaines en Iran en 2019.
Formé à la Manufacture Nationale des Gobelins de Paris de 1971 à 1976, Hervé Grimal a étudié les arts textiles, le dessin et l’histoire de l’art, passant nombre de ses journées au musée du Louvre. Son diplôme en poche, il travaille pour des artistes, crée des tapisseries et se met à la peinture. C’est à ce moment-là qu’apparaît les prémices de sa future aventure artistique.
Le texte émerge d’abord par touche dans sa peinture avant de dédier sa pratique exclusivement à la création de livres d’artiste, en 2000. Des phrases dansent alors dans ses compositions comme il était coutumier de le faire à l’époque. À cela s’ajoute les voyages qu’il chérit depuis longtemps, portant un grand intérêt pour les métissages culturels. Sa découverte de l’Égypte en 2002 est finalement l’élément déclencheur de sa nouvelle odyssée artistique. « J’avais déjà fait quelques livres d’artiste à base d’aquarelles sur différents thèmes, mais l’approche était différente. » À son retour, il réalise son premier livre d’artiste tel qu’on les connaît aujourd’hui. « C’est une approche beaucoup plus intime que la peinture. On tient le livre entre les mains, on le parcourt, on le touche. Ça me plaisait de projeter quelque chose. »
Son cheminement suit celui de tout artiste voyageur, mais son processus créatif, et sa démarche, sont quant à eux innovants et personnels. Sur place, l’auteur prend beaucoup de notes et capture des instantanés de vie et de culture par le biais de photos ou dessin au fil des rencontres et des explorations. « Au retour, je travaille mon texte puis je passe aux iconographies, à base de dessins, aquarelles et photos scannés pour créer une composition comme un tableau. » De la préparation en amont aux présentations dans les salons et autres événements, en passant par le voyage en lui-même et la création du livre, Hervé Grimal vit son voyage plusieurs fois et le réactive à chaque rencontre, c’est d’ailleurs ce qui le passionne.
Imprimé sur du velin, papier destiné à l’édition d’art, le bel ouvrage rappelle les livres anciens et les manuscrits, peut-être en référence à ces heures passées le long des quais de la Seine, à Paris, où les étals de livres anciens et d’occasion appellent le passant. À l’instar de ses précédentes créations, Perse-Iran, un trait d’union entre l’Orient et l’Occident plonge l’acquéreur dans l’histoire de l’artiste avec le pays. Il met un peu de lui dans chaque livre d’artiste. Il y couche à l’intérieur ses souvenirs, ses ressentis et impressions avec sensibilité. Après le beige du sable en Égypte, le gris fantomatique de la brume de la baie d’Halong au Vietnam, le bleu des mosaïques sur les monuments iraniens ouvre les portes de toute une civilisation qui n’a eu de cesse de l’émerveiller. Par ce choix, il cherche à retrouver l’atmosphère des lieux qui ont caractérisé et marqué son voyage.
Dès la première page, l’artiste se confie en toute humilité et révèle une attirance ancienne pour la Perse. « Quand j’étais étudiant à Paris, je suis tombé sur un livre d’Hâfez, un poète iranien du XIVe siècle. Une lecture fabuleuse et étonnante. Tous les foyers d’Iran possèdent des livres du poète et les enfants apprennent par cœur ses poésies », se remémore-t-il. « Les mollahs n’ont pas pu l’interdire, car il fait partie de leur culture, mais c’est le poète de la luxure, de l’ivresse et de l’amour. »
L’objet-livre se déplie et révèle une fresque de sept mètres. Particulièrement inspiré par le pays, Perse-Iran est le plus important en termes d’écriture et de format. Dans un juste équilibre entre iconographies et textes, Hervé Grimal cherche à faire vivre une expérience sensible plus qu’une recherche de l’originalité. Ce que l’on pourrait définir comme un carnet de voyage, en écho à ceux courant au XIXe siècle, flirte avec le récit de voyage de par l’importance du texte dans chacune de ses créations. « Au début, je procédais plus dans l’esprit carnet de voyage mais, petit à petit, j’ai eu besoin d’enrichir. » Ne se définissant pas comme un littéraire, l’artiste confie néanmoins que la littérature a toujours compté, et ce dès l’adolescence. Lecteur effréné, il a lu les grands auteurs et à chaque voyage, il s’imprègne du pays en dévorant sa littérature. Le passage de la lecture à l’écriture s’est ainsi fait naturellement, une prose qui lui vaudra d’ailleurs le prix de l’écriture à la 8e biennale du carnet de voyage de Clermont-Ferrand en 2007.
« ON SENT UNE SOLIDARITÉ CHEZ LES JEUNES, MAIS AUSSI CHEZ LES ADULTES. ILS ONT ENVIE DE NOUS MONTRER LEUR PAYS, LEUR VIE. QUAND ON S’INTÉRESSE À EUX, QUELQUE CHOSE SE PASSE. »
Au contact de la population, Hervé Grimal s’est rapidement rendu compte de la gentillesse des Iranien.ne.s et de leur bienveillance à l’égard des voyageurs. « Ils échangent beaucoup, veulent se faire prendre en photo et communiquer. C’est le pays où on a eu le plus d’échanges », déclare-t-il. Il rajoute, l’esprit nimbé de souvenirs : « Un miniaturiste à Ispahan a réalisé un portrait d’Hâfez sur un petit os blanc à l’aide d’un petit pinceau. C’était époustouflant…» Ma compagne a voulu lui acheter, mais l’artisan a simplement répondu : « Ça n’a pas de prix, je vous l’offre ». Ou encore, « les femmes étrangères sont obligées de porter le foulard, mais dans les bazars, les commerçants nous disaient qu’elles pouvaient les retirer. »
De ces compositions ressort une chaleur, qu’il définit propre au pays, des traditions et une culture riche, partagées avec plaisir. Celle qui fut une des premières civilisations avec la Mésopotamie s’est ouverte à Hervé Grimal en toute honnêteté et l’artiste voyageur nous retranscrit son vécu, alternant discours personnel, informations culturelles sur le pays et compositions quasi picturales. « J’aime trouver cet équilibre entre texte et iconographies pour qu’elles soient complémentaires. Comme l’échange qu’il se produit lors des voyages, il y a un échange entre le texte et l’image. »
La riche iconographie révèle la diversité du peuple et du pays autant que celle des médiums utilisés. Photographie, dessins, aquarelles et l’ordinateur qu’il utilise comme un crayon se font les messagers, autant que le texte. « Le dessin est universel ce qui permet le lien entre les différentes populations dans les symboles que l’on va retrouver dans différentes civilisations. »
Quand on lui demande quels souvenirs ont été pour lui les plus marquants, il se souvient particulièrement d’un échange avec un jeune homme reçu au concours pour entrer en tant qu’ingénieur à l’aérospatial à Toulouse. Malheureusement, il ne pensait pas avoir le visa pour venir… Dans la même ville, il raconte sa rencontre avec des étudiants passionnés à Ispahan. « Ils nous parlaient de leur vie, de leurs espoirs et en même temps, ils savent qu’il y a cette chape de plomb. Ils sont résignés pour leur présent, mais se battent pour que les générations futures soient libres. »
À l’écouter, on comprend combien les voyages sont formateurs. Ils permettent de relativiser et de prendre du recul quand on se retrouve face à la réalité des choses. Pour cette raison, le temps est important chez Hervé Grimal, pour que son expérience mûrisse et qu’il s’approprie tout l’enrichissement culturel qu’il a ramené avec lui d’Orient. Il lui aura fallu huit mois pour concevoir Perse-Iran.
La parution de son prochain livre d’artiste est prévue au printemps 2022 et traitera de la Russie. « Je suis en retard sur mes voyages », s’amuse-t-il. Hervé Grimal pense déjà à ses prochains voyages et si les frontières rouvrent, le Japon sera le thème de son prochain livre d’artiste…
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